s. f. Petit insecte tantost rouge, tantost noir, qui se trouve en prodigieuse quantité dans les troncs des vieux chesnes, & qu'on croit vivre ensemble avec une sorte d'oeconomie. La fourmi vient d'un oeuf qui se change en ver. Elle a douze petites incisions ou petits anneaux dont son corps est composé. Elle a deux yeux, deux cornes & des dents dans la teste, & six jambes qui sortent de sa poictrine. La premiere peau de la fourmi est parfaittement unie ; ensuitte on y remarque des rides & des especes d'incisions ; & enfin elle se divise en plusieurs parties. Elle se depouille de diverses peaux dans des temps differents. Cette derniere peau devient dure, comme de la corne ou de l'os, jusques là qu'il n'est pas possible de la percer avec une lancette fort aiguë, non plus que celle des escarbots nasicornes, & quelques autres insectes. Son bec est composé de deux dents qui s'estendent au dehors, sur chacune desquelles on void encore sept incisions qui paroissent comme autant de petites dents. Ses yeux sont tout à fait noirs. Ses cornes qui sont au dessus des yeux sont d'un chastain un peu brun, & sont composées chacune de douze petites parties revestuës de poils. Les joinctures de la poictrine se divisent chacune en six parties aiguës qui s'avancent dehors. Ses reins sont composez de trois boutons, dont la figure approche un peu de celle des vertebres, & qui sont par tout revestus de poils assez roides. Ses jambes sont fortes & veluës, composées de six parties, dont celle qui est à l'extremité est armée de deux ongles ou de deux pinces. Le ventre est un peu plus roux que le reste du corps. Il est luisant comme un miroir, & parsemé de petits poils. On n'y decouvre aucune partie qui puisse marquer qu'elle soit masle ou femelle ; en quoy elle convient avec les abeilles. Mais il y a une autre fourmi masle qui a quatre ailes & des yeux beaucoup plus grands, ayant sur sa teste trois petites escailles semblables à des perles, qui le rendent different des autres fourmis. Sa structure & ses jointures sont aussi toutes differentes. Ses deux ailes de devant sont deux fois plus grandes & plus fortes que celles de derriere, & tout son corps est plus grand & d'une couleur plus noire. Les masles des fourmis ne servent qu'à la propagation, & cette pretenduë superiorité qu'on leur attribuë, aussi bien qu'aux Rois des abeilles, ne procede que des mouvements puissants qui les portent à la generation. La fourmi mere est encore plus grosse que le masle, qui a aussi sur la teste ces trois petites escailles qui sont sur la teste du masle ; & en cela elle differe des fourmis ordinaires.

On dit qu'il y a des fourmis blanches qu'on voit sur le haut du petit escueil de Pecno proche d'Athenes, dont le sommet est plein d'un sable d'une blancheur extraordinaire.

La fourmi a un zele & un amour si extraordinaire pour ses petits, qu'elle conduit dans les lieux où ils peuvent trouver leur nouriture convenable ; & quand ils sont couppés en deux, elle en remporte les pieces entre ses bras.

On envoye les prodigues à l'escole de la fourmi, qui fait des provisions l'esté pour l'hiver. On dit que la fourmi ronge le germe du bled, afin qu'il ne germe point dans la terre où elle le garde. On dit aussi qu'il y a des fourmis d'Inde qui sont ailées, cornuës & grosses comme un loup, qui tirent l'or des mines. Mais cela est fabuleux. Il y a dans Angola un si grand nombre de fourmis, & si grosses, qu'on a trouvé des squelets de vaches qui en ont esté mangées en une nuict. Il y a des fourmis dans la Chine & dans le Tunquin qui volent en troupes sur des arbres & y font une espece de gomme ou de cire dont on compose la laque si connuë par les Teinturiers, & qui est le principal ingredient de la cire d'Espagne.

On dit en proverbe, qu'une personne a mangé des oeufs de fourmi, quand elle lasche beaucoup de vent : on dit aussi, qu'elle a des oeufs de fourmi sous les pieds, lors qu'elle ne peut demeurer en place, qu'elle a grande envie de marcher. On dit, qu'on rendra un homme plus petit qu'une fourmi, pour dire, qu'on l'humiliera beaucoup, qu'on le ruinera.